27 mai 2025

Faut-il inclure les bulletins nuls dans le décompte du vote blanc révocatoire ? Pourquoi c’est une fausse bonne idée.

 Parmi les pistes souvent évoquées pour réformer nos processus électoraux, l’idée d’inclure les bulletins nuls dans le calcul d’un “vote blanc révocatoire” fait surface de temps à autre. D’un point de vue symbolique, cela peut sembler logique. Après tout, ceux qui glissent un bulletin raturé ou non conforme dans l’urne ont, eux aussi, fait l’effort de voter.

Mais il faut distinguer effort et message. Le cœur de la question est là : qu’exprime un vote nul ? Rien de clair. Et c’est précisément ce flou qui pose problème.


Le vote nul : un geste sans signal

Un vote blanc dit quelque chose : “Je suis là, je regarde ce scrutin, mais je refuse l’offre.”
Un vote nul, lui, dit… quoi ? C’est difficile à dire. Il peut être un oubli, une erreur. Un acte de protestation. Un geste absurde. Ou un simple manque d’information. Le Conseil constitutionnel lui-même le classe comme “bulletin irrégulier”, c’est-à-dire invalide, sans valeur politique explicite .

Ajouter ce genre de vote dans un mécanisme aussi décisif qu’un seuil d’invalidation reviendrait à introduire de l’ambiguïté dans un processus qui doit rester lisible, compréhensible, incontestable.


Une porte ouverte aux manipulations

Autre souci : la facilité avec laquelle des bulletins nuls peuvent être générés. Une organisation qui voudrait saboter un scrutin aurait plus de facilité à inonder les urnes de votes nuls que de mobiliser des électeurs à voter blanc en connaissance de cause.

Et dans un système révocatoire où l’élection est annulée si les votes blancs (et nuls) dépassent le score du candidat en tête, cette faille devient stratégique. On fragilise la sincérité du vote, au lieu de la protéger.


Une autre nature, un autre traitement

C’est aussi une question de nature. Si l’on veut donner une place politique aux bulletins nuls, cela mérite un travail spécifique. Pas une inclusion de fortune, plaquée sur un débat qui concerne avant tout l’expression consciente d’un refus politique clair.

Traiter le vote nul comme le vote blanc reviendrait à gommer cette distinction essentielle : celle entre le flou et le message.


Conclusion

Inclure les bulletins nuls dans un mécanisme d’invalidation automatique des scrutins serait une erreur. Cela brouillerait le signal démocratique au lieu de le clarifier. Cela ouvrirait la porte aux abus. Et surtout, cela mélangerait deux types de geste qui ne disent pas la même chose.

Reconnaître le vote blanc, c’est donner du poids à un choix. Reconnaître le vote nul, c’est prendre le risque de faire parler le silence.

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